GROWING d’Agata Wieczorek (France)
2021 – Fantastique - 17 minutes et 44 secondes
Avec Dominika Walo, Viktoria Zmysowska, Micha Wodarczyk, Angelika Korzeniowska
Production : Le Fresnoy – Studio national des arts contemporains
Synopsis : Ewa suit une formation en soins infirmiers en maternité dans un centre de simulation médicale. La grossesse et le travail sont exécutés de manière répétitive par des corps artificiels dans le cadre de procédures automatiques, où aucune interruption n'est autorisée. Reconnaître les caractéristiques humaines d'un mannequin féminin simulant une grossesse déclenche une série d'événements qui amènent Ewa à remettre radicalement en question la réalité simulée et la maternité en tant qu'expérience prédestinée.
Growing, premier court-métrage de la réalisatrice polonaise Agata Wieczorek, est un « body horror » qui m’a fait penser sur la fin au long-métrage Baby Blood d’Alain Robak.
Growing transpire le cinéma de David Cronenberg, où le corps est la matière au film, où le corps est sublimé, torturé, expérimenté. On trouve aussi des similitudes avec le cinéma de la cinéaste française Julia Ducournau (Junior, Grave, Titane). Growing est une œuvre d’Art, un film d’Art, à part entière. C’est un film intellect qui dénonce l’interdiction au droit à l’avortement en Pologne qui a refait son apparition récemment et qui fait polémique. Le film montre que le corps est une propriété privée, c’est notre moi, et non le corps de la société. Nous ne sommes pas des cyborgs ou des humanoïdes, mais bien des êtres vivants et réels.
Growing est donc un film politique, critique acerbe de la société actuelle en Pologne.
La photographie de Joanna Kakitek est superbe esthétiquement. Les images sont pures, froides dans le centre de simulation médicale, où les gestes sont automatisés jusqu’à la perfection avec des ventres automatisés et des bébés cyborgs.
Et devinez qui on retrouve au poste des effets spéciaux ? Monsieur David Scherer. Cet homme est partout (Je commence à me demander s’il n’a pas été cloné ou s’il n’a pas son propre cyborg ?).
Les effets FX sont le véritable succès du film. Ils sont d’une très grande qualité pour un court-métrage. Et Growing est truffé d’effets spéciaux.
Le « sound design » de Jeremy Liccardo d’Angela est également un élément important du film. Je ne me souviens pas d’une musique, mais de sons omniprésents.
La fin du film en traumatisera plus d’un, signature du « body horror » comme on les aime et qui m’a fait penser comme je l’ai déjà dit au long-métrage Baby Blood. Une fin à la hauteur de cette interdiction du droit à l’avortement qui peut être perçue comme violent et inhumain.
Quand on doit vivre avec quelque chose dans son propre corps à l’insu de son plein grès, la santé psychologique en prend un coup. Vous n’êtes plus maître de votre propre corps et la société impose son diktat. Le fait d’interdire l’avortement amène à des situations compliquées et dangereuses. C’est un véritable sujet sociétal et le fait que la Pologne ait fait machine arrière sur le sujet est lourd de conséquences et de libertés. C’est ce que dénonce la réalisatrice Agata Wieczorek qui signe un premier court-métrage d’une rare qualité. Un uppercut direct dans le ventre !
Growing est en compétition officielle au Festival de Gérardmer 2023.
Mad Oliver.