Bande annonce THE NIGHTINGALE Un film de Jennifer Kent
1825, dans l'Australie sous domination anglaise. Après avoir purgé sa peine, Clare, une jeune bagnardeirlandaise, va bientôt pouvoir vivre librement auprès d...
THE NIGHTINGALE de Jennifer Kent (Australie)
2018 – 136 minutes – action, aventure
Avec Aisling Franciosi, Sam Claflin, Baykali Ganambarr
Dvd édité chez Condor Distribution depuis le 15 avril 2021.
Synopsis : 1825, dans l’Australie sous domination anglaise. Après avoir purgé sa peine, Clare, une jeune bagnarde irlandaise, va bientôt pouvoir vivre librement auprès de son mari et de son bébé. Mais son officier de tutelle n’en a pas fini avec elle: rossée et laissée pour morte, Clare assiste impuissante au massacre de sa famille par des soldats britanniques. A son réveil, au bord de la folie, elle se lance à leur poursuite au travers des terres vierges de Tasmanie. Dans cette région sauvage et isolée, où les lois des hommes ne s’appliquent plus, elle ne reculera devant rien pour se faire justice.
The Nightingale est le second long-métrage de la réalisatrice australienne Jennifer Kent qui avait réalisé un très bon premier film dans le genre horrifique : Mister Babadook, récompensé (par quatre prix) au Festival de Gérardmer en 2014. Les deux films ont été écrits par la réalisatrice elle-même.
Le film n’ayant pas eu de sortie dans les salles françaises dû à la Covid19, ce qui est particulièrement décevant, car certaines scènes méritaient d’être vues sur un grand écran de cinéma, parlons directement du format Dvd édité chez Condor, dont la jaquette fait penser au titre The Trooper d’Iron Maiden. Et ce n’est pas le seul point commun avec le film : il est aussi question de guerre anglaise. A travers les bonus, on apprend que la réalisatrice s’est beaucoup documentée sur cette histoire de colonisation anglaise de l’Australie et de la Tasmanie du dix-neuvième siècle, où des camps prisonniers étaient élaborés. Jennifer Kent s’est même entretenu avec un historien aborigène pour que les scènes soient au plus près de la réalité des coutumes et des dialectes. Le spectateur est plongé dans cette fiction frôlant de près la réalité et ne peut en ressortir que bouleversé et choqué.
Nightingale raconte l’histoire de Clare, une jeune prisonnière irlandaise, titre de propriété d’un officier anglais qui l’a sorti de prison. Ce dernier se croit tout permis. Abus sexuel, intimidation, rabaissement, humiliation … Puis un jour, ou plutôt une nuit, l’officier et ses deux compères vont aller trop loin et vont commettre des actes odieux et irréparables transformant Clare soumise à l’officier en un loup assoiffé de sang. Sous sa forme de « Rape and Revenge », Nightingale est beaucoup plus profond, riche et puissant que ses prédécesseurs (Revenge ou Violation pour les plus récents). Ce n’est pas qu’une histoire de viol et de vengeance. Il y a tout d’abord cette référence historique de colonisation anglaise de l’Australie qui est forte intéressante et que l’on ne connait pas forcément, nécessitant quelques clics sur le site Wikipedia et cie. Et puis il y a cette relation entre deux sous-classes, deux losers, l’irlandaise Clare et l’aborigène Billy, que tout oppose au début du film, excepté peut-être leur statut social, sauf que l’on peut tuer un noir sans avoir d’ennui. Et puis, chemin faisant, ils vont apprendre à se connaître et leur histoire personnelle va les rapprocher, les humaniser aussi. Et à contrario, il y a ces soldats anglais envoyés au front à tuer des aborigènes tels des sauvages qui n’en ressortiront pas indemne. Ils sont le fruit d’une déshumanisation dû aux ordres des supérieurs. LBref, Nightingale est très riche en sujets, bien écrit et ficelé. C’est un film puissant montrant différentes faces humaines.
Nightingale est très réussit, choquant et bouleversant. La mise en scène est sublime. Elle ne va jamais trop loin, même si la première demie heure peut-être insoutenable. L’actrice d’origine irlandaise, Aisling Fransiosi qui interprète Clare vient de jouer l’un des rôles de sa vie. Un rôle pas du tout évident demandant beaucoup de volonté et de travail. Elle est magnifique. L’acteur charismatique Baykali Ganambarr (L’aborigène Billy « boy ») est énorme de justesse. Les deux acteurs portent le film sur leur épaule qui en ressort plus haut. Impossible de ne pas résonner avec leur personnage, de ne pas éprouver d’empathie envers eux. Sam Clafin, qui joue l’officier odieux Hawkins, dévoile un jeu plein d’antipathie. Damon Herriman interprète Ruse son sbire. Formidable. Les acteurs sont la semence de ce fruit délicieux, si je puis dire de Nightingale. Que dire des scènes se passant dans la jungle de Tasmanie, si ce n’est qu’elles sont magnifiques. On peut dire qu’avec The Nightingale, Jennifer Kent a passé haut la main le test critique du second long métrage où les réalisateurs ayant accouché d’un bon premier film sont attendus avec des couteaux aiguisés par la critique.
Nightingale est un petit bijou noir et sombre à découvrir de toute urgence, mais à ne pas mettre dans les mains d’âmes sensibles. C’est une expérience viscérale dans les entrailles de la guerre et des âmes torturées.
Je remercie Lorenzo Bellassai.
Olivier H.